Qu'est-ce qu'une Muance?

Le mot "Muance" vient du solfège ancien qui utilisait la main guidonienne illustrée ci-dessous.
Les notes chantées étaient ut, ré, mi, fa, sol et la (il n'y avait pas de si), elles étaient au nombre de 6, d'où le nom d'hexacorde. L'intervalle mi-fa représentait ainsi toujours le demi-ton tandis que toutes les autres notes de l'hexacorde étaient séparées par un ton.
Ainsi, lorsqu'une note chantée dépassait la téssiture de l'héxacorde, il fallait passer d'un hexacorde à un autre au moyen d'une muance (en latin mutatio).
Pour chanter les notes que l'on chante actuellement "do ré mi fa sol la si do" on chantait alors: "ut ré mi fa sol mi fa", où les "ut ré mi fa sol" du début appartenaient à l'hexacorde "par nature" tandis que les " mi fa" suivants appartenaient à l'hexacorde "par bécarre" grâce à une muance ainsi opérée sur le deuxième (qui se serait appelé la s'il n'y avait pas eu de muance).
Ainsi on avait majoritairement trois hexacorde: Autre exemple, cette fois, en descendant la gamme: pour chanter les notes que l'on chante actuellement "do si la sol fa mi ré do" on chantait alors: "fa mi la sol fa mi ré ut", où les "fa mi" du début appartenaient à l'hexacorde "par bécarre" tandis que les "la sol fa mi ré ut" suivants appartenaient à l'hexacorde "par nature" grâce à une muance ainsi opérée sur le la (qui se serait appelé s'il n'y avait pas eu de muance).
Au moyen de ce système, on pouvait chanter toutes les musiques qu'elles aient des si bémols ou bécarres en passant ainsi d'un hexacorde à l'autre au moyen de ces fameuses muances. Pour les autres bémols ou les dièses il a suffit par la suite de créer de nouveaux hexacordes et leurs muances correspondantes...
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Main guidonienne (appelée ainsi car décrite par Guido d'Arezzo), tirée d'un manuscrit de Mantua, dernier quart du XVème siècle (Oxford University MS Canon. Liturg. 216. f.168 brecto).
Notez qu'il s'agit d'une main gauche où le premier hexacorde (qui commence sur les notes que nous chantons actuellement sol, la, si, do, ré, mi) commence sur les phalanges du pouce (ut, ré, mi) et se poursuit sur la base des trois doigts suivants de la main (fa, sol, la). Le deuxième hexacorde (par nature), commence sur la base de l'index et se poursuit sur la base des doigts suivants jusqu'au petit doigt (ut, ré, mi, fa) où il faut alors remonter sur les phalanges du petit doigt pour avoir les notes suivantes (sol, la). Le troisième hexacorde (par bémol), commence sur la base du petit doigt et remonte le long de ses phalanges jusqu'à l'extrémité du petit doigt (ut, ré, mi, fa), pour ensuite continuer sur l'extrémité des autres doigts (de l'annulaire puis du majeur) (sol, la). Le quatrième hexacorde (par bécarre) commence sur la deuxième position sur les phalanges du petit doigt et remonte jusqu'à son extrémité (ut, ré, mi), pour ensuite continuer lui aussi sur l'extrémité des autres doigts (de l'annulaire, du majeur et de l'index) (fa, sol, la). Le cinquième hexacorde (par nature) commencera sur l'extrémité de l'annulaire, puis celle du majeur et de l'index (ut, ré, mi) et redescendra ensuite sur deux phalanges de l'index (fa, sol) pour terminer sur la deuxième position des phalanges du majeur (la). Si vous avez réussi à trouver le sixième hexacorde qui poursuit le même chemin en "escargot" dans la main vous avez gagné ;).
Ainsi certaines notes peuvent avoir jusqu'à 3 noms différents en fonction de l'hexacorde dans lequel elles se trouvent (par exemple la note que nous appelons actuellement "do" et qui se trouve sur l'extrémité de l'annulaire pouvait s'appeler sol, fa ou ut suivant l'hexacorde employé comme on le voit sur le dessin :)). Si vous avez des questions, nous y répondrons avec plaisir à l'issue de notre prochain concert!



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